BCE : le pays où le droit social n'existe pas
Par Le concierge du Musée le mercredi 8 avril 2015, 14:56 - Quatrième nuit de Walpurgis - Lien permanent
Dans un article paru sur le site d'ATTAC, on apprend que la Banque Centrale Européenne a la cohérence d'appliquer sa vision du monde à son propre personnel. Celui-ci n'a donc aucune excuse pour continuer à participer à la "banalité du mal", à moins qu'il ne se contente de revendiquer le droit social, que la BCE a pour mission occulte de détruire, pour lui seul ?
Une militante dénonce la dictature de la BCE le 15 avril 2015 lors de la conférence de presse de Mario Draghi
Quel est donc le droit applicable aux salariés de la BCE ? Un « droit BCE » spécifique, élaboré de manière unilatérale par le Conseil des gouverneurs et le Directoire.
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Ce pouvoir est très large : pour ses salariés, la BCE légifère ainsi sur le droit applicable en cas de licenciement, sur le niveau de couverture médicale auquel peuvent prétendre ses salariés et leur famille, sur le système de retraite et la répartition de son financement entre différentes catégories, sur leur droit (ou absence de droit) au chômage quand leur contrat de travail a expiré, sur le droit des salariés à participer à des activités extra-professionnelles (politiques ou associatives) et plus généralement sur tout un ensemble de droits fondamentaux, comme les restrictions imposées à leur liberté d’expression, à leur droit de propriété (tous les types de placements ne leur sont pas autorisés), à leur droit d’exercer telle ou telle type d’activité professionnelle à la fin de leur contrat, à leur droit à la représentation par des salariés élus, à la reconnaissance (ou non) de l’union entre partenaires de même sexe (avec les éventuels effets sur le droit à la couverture médicale du conjoint ou à une pension de réversion en cas de décès), etc.
Par analogie avec la situation en France, cela reviendrait à laisser au MEDEF le droit d’adopter non seulement le Code du travail, mais aussi le Code de la Sécurité sociale, certains pans du Code de la famille, et de légiférer sur les restrictions à certains droits fondamentaux !
Pour ses salariés, la Banque centrale européenne n’est donc pas seulement un employeur, mais elle occupe aussi un rôle de législateur. Dans ce cadre, l’expérience a montré qu’un certain nombre de droits qui avaient été conquis tout au long du XIXe siècle et du XXe siècle ont dû ou doivent encore être reconquis, car la BCE a fait le choix de repartir à zéro sur un certain nombre d’aspects.
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La situation contractuelle du personnel enfin est aussi une source de soucis pour nombre d´entre eux, puisque sur les 4000 collègues travaillant à la BCE, seuls 1250 ont un contrat permanent, les autres courant de contrats temporaires en contrat temporaires, ou étant embauchés au travers de formes atypiques de travail (intérimaires, body‐leasing, stagiaires, etc). La norme à la BCE, contrairement à ce qu’impose le modèle social européen, c’est le contrat temporaire. Personne ne débute d´ailleurs d’emblée avec un contrat permanent : c’est interdit au terme des règles de la BCE (les Staff Rules) !
Pour finir, ultime expression du déficit démocratique : les statistiques de promotion montrent que celui qui fait le choix de devenir représentant du personnel peut faire une croix sur sa carrière. Les candidats aux élections professionnelles ne se bousculent donc pas au portillon – 10 candidats pour 9 postes à pourvoir aux dernières élections en 2014, et pas une seule femme ! La boucle est bouclée.
Lire l'article publié sur le site d'ATTAC par Carlos Bowles, président du Comité du personnel de la Banque centrale européenne et Emmanuel Larue, président du syndicat IPSO.