Contre le terrorisme, les prémices du fascisme
Par Le concierge du Musée le vendredi 31 juillet 2015, 18:34 - Tunisie - Lien permanent
Signe que le climat ultra répressif n’a pas attendu le législateur pour sévir : au moment même où les députés se penchaient sur la loi de manière expéditive, symbolique du 25 juillet en tête, le ministère de l’Intérieur annonçait des descentes de police dans pas moins de 99 locaux, aux quatre coins du pays, soupçonnés d’« abriter des organisations terroristes ».
Parmi eux, l’auteur d’une banale vidéo de type conspirationniste, accusant les autorités de complicité dans l’attaque du 26 juin à Sousse. Il faut dire que la vidéo en question est rapidement devenue virale, avec plus d’un demi-million de vues en quelques jours, les esprits réceptifs aidant. De là à l’accuser, le 27 juillet, de « terrorisme », il y a clairement une fuite en avant dans l’hystérie collective.
Une névrose particulièrement explicite dans les titres d’une certaine presse adepte du terrorisme intellectuel, où le bon vieux procédé toujours fascisant des « listes » est de retour : les noms des 10 élus qui se sont abstenus de voter la nouvelle loi est donné en pâture, avec l’injonction implicite d’en découdre via le « takhwin », réflexe intellectuel cousin du « takfir ». Un exercice dans lequel excelle depuis peu le journal du service public La Presse. Dans son édition du 28 juillet, le quotidien appelle carrément à poursuivre en justice les députés qui se sont abstenus de voter la nouvelle loi antiterroriste.
Pourtant, l’héroïsme des dix iconoclastes est tout relatif. Reconnaissons-leur du moins le mérite d’être venus affronter la séance du vote, et de ne pas s’être défilés comme les 23 absents, probablement soucieux de ne surtout pas être associés pour le restant de leur vie au grotesque procès d’intention d’« absolution du terrorisme ». En soi, le 0 vote contre en dit long sur l’état de santé de la démocratie tunisienne.
Lire l'article de Seif Soudani paru sur le site Nawaat.org