Blanchir le CETA, salir ses critiques
Par Le concierge du Musée le jeudi 27 octobre 2016, 20:00 - Observatoire de l'UE - Lien permanent
Paul Magnetto, mauvais mutant (évidemment!) du PS
S'il est un indice particulièrement probant de la campagne d'enfumage menée par le PS francophone et Paul Magnette au-cours des dernières semaines, c'est que ce dernier a accepté le principe de la ratification du mandat résultant de l'accord intra-belge du jeudi 26 octobre 2016 avant vendredi minuit. Ainsi l'exécutif wallon impose son propre ultimatum au Parlement wallon dont il prétendit défendre les prérogatives mordicus au-cours des derniers jours, à grand renfort de déclarations aussi émouvantes que celles de Tsipras avant le référendum grec que celui-ci espérait perdre ! Façon aussi de faire oublier à tout le monde un principe fondamental : quand on est de gauche, on ne signe pas de traité de libre-échange ! Tout simplement ! Nous publions ci-dessous l'extrait d'un article du Corporate Europe Observatory disséquant la méthode d'intoxication de l'opinion publique mise en œuvre dans la dernière ligne droite précédant la signature afin de fournir des méthodes clé en main aux gouvernements pour sortir leur stylo sans trop s'aliéner les électeurs, voire en se faisant passer pour des héros. Manifestement, c'est une méthode de ce type qui a été utilisée en Wallonie... Le Concierge
Dans les dernières semaines de ligne droite menant à la signature du CETA, la Commission européenne, le Gouvernement canadien ainsi que certains gouvernements des États-membres et Députés européens sont passés en mode propagande massive. Ils ont décrit le CETA comme « un accord commercial très progressiste » (Commissaire au Commerce Cecilia Malmström) qui va « réguler la globalisation » selon les principes du « commerce équitable » et dans l’intérêt des travailleurs (Frank Walter Steinmeier, ministre des affaires étrangères allemand). Les critiques de l’accord ont été qualifiés de « hooligans du commerce » (Donal Tusk, Président du Conseil) qui « attisent des peurs et des inquiétudes qui n’ont rien à voir avec le texte actuel du CETA » (les eurodéputés conservateurs Daniel Caspary et Elmar Brok). Certains médias ont rejoint le chœur des contempteurs du CETA, proclamant que « la plupart des critiques qui peuvent se justifier au sujet du TTIP ne concernent pas le CETA » (Spiegel online).
La dernière offensive de relations publiques consiste en une « déclaration interprétative jointe » au traité concoctée par Ottawa et Bruxelles et publiée par le collectif de journalistes d’investigation Correctiv. Elle est conçue pour rassurer le public mais ne corrige aucune tare du CETA. En septembre dernier, la Ministre canadienne du commerce Chrystia Freeland et son homologue allemand Sigmar Gabriel, avaient annoncé un tel texte pour amadouer ls socio-démocrates allemands, les syndicats et le grand public qui craignent que le CETA menace les services publics, les travailleurs et les normes environnementales et grève le pouvoir de régulation des gouvernements dans l’intérêt public. Plusieurs gouvernements, notamment l’Autriche, avaient lié leur signature du CETA à une telle déclaration.
Selon les principes internationaux auxquels se réfère la déclaration jointe (Convention de Vienne sur le Droit des Traités), elle s’imposera légalement au Canada, à l’UE et ses États-membres. Mais le contenu de la déclaration ne contient rien qui concerne, encore moins résolve, les points du CETA menaçant les services publics, le processus de décision démocratique, les financements publics etc. En effet, selon le professeur de Droit allemand Markus Krajewski, elle « n’offre aucune amélioration ni solution à aucun des points contestés et majeurs » du CETA. Aussi, si la déclaration était invoquée dans un procès futur lié au CETA, ce serait sans effet conséquent. Selon Greenpeace cette déclaration a « la portée juridique d’un dépliant de tourisme ».
Simon Lester du Cato Institue, un think tank dévoué au libre-échange a déclaré : « Quiconque a des inquiétudes, mais s’estime rassuré par ceci, ne comprend pas grand chose au Droit ».
Des juristes ont également mis en garde sur le fait que la déclaration « puisse induire de non-juristes en erreur, qui pourraient être amenés à croire que la Déclaration change ou surpasse le CETA ». Mais elle ne change rien au CETA au plan juridique, et c’est sur ce plan-là que se concentrent les inquiétudes. C’est ce qu’explique Gus van Harten, professeur de droit canadien, « sur la base des principes d’interprétation des traités, le CETA sera interprété d’abord sur la base de ses propres dispositions effectives... La Déclaration jouera, dans le meilleur cas, un rôle subsidiaire dans ce processus d’interprétation ». En d’autres termes, légalement (et donc politiquement) le texte du CETA est beaucoup plus important que la Déclaration, et le premier prévaudra sur la seconde en cas de conflit d’interprétation.
Extrait de : The great CETA swindle, 18 octobre 2016.