Cet article a été publié par Marc Raoul Jennar avant que le compromis intra-Belges soit signé. On peut le consulter ici. (Note du Concierge)

A supposer qu’un accord intervienne entre Belges – ceux-ci ont un sens aigu des compromis gagnant-gagnant, hors desquels il y a longtemps qu’il n’y aurait plus de Belgique – il faudrait encore que les 27 autres Etats de l’UE acceptent ce compromis. Et qu’ils décident d’ordonner à la Commission (qui sera réticente à se dédire) de le négocier avec le Canada. Et que les Canadiens l’acceptent. Tout ça avant jeudi, sachant que la réunion de mardi n’a pas abouti ?

Aussi longtemps que les Wallons ne bougeront pas sur le mécanisme d’arbitrage et le mécanisme de régulation (qu’on retrouve dans le TTIP-Tafta), il me semble impossible d’atteindre un accord. Ces deux mécanismes sont ceux qui font qu’on n’est plus dans le libre-échange, mais dans le démantèlement des États au profit des multinationales et des pouvoirs technocratiques. Ce qui est l’objectif recherché par ce type d’accords qui veulent dépasser les accords de l’OMC.

L’enjeu de ce qui est en cours est d’une importance majeure pour l’avenir. Il ne faut pas être grand clerc pour imaginer les pressions colossales qui doivent être exercées sur le Gouvernement wallon et sur les parlementaires wallons pour qu’ils renoncent. Menaces et promesses doivent alterner et augmenter en intensité.

Ce que tente la Wallonie, c’est rien moins que mettre fin à une évolution commencée en 1994 avec les accords de l’OMC, avec l’ALENA, avec le TTIP-Tafta, avec le CETA, avec le TISA, avec les APE*, dont l’objectif final est l’effacement des Etats devant le monde des affaires et de la finance, aux Etats n’étant laissé que les fonctions sécuritaires.

Raoul Marc Jennar (26 octobre 2016)

Ajout du 27/10/2016

Que penser de l'accord intra-Belges ?

Ce que j'ai lu est un texte d'un jargon juridique imbuvable. Il demande une analyse minutieuse. Ce que j'ose avancer à ce stade très précoce, c'est que le texte semble davantage se présenter comme "une réserve globale" de la Belgique à un traité qui demeure inchangé. Il est fréquent - et les traités européens en comptent beaucoup - qu'un Etat partie à un traité émette des réserves ou s'exclue de l'application de certains éléments du traité avec l'accord des autres Etats signataires (les Britanniques ont fait cela pour chaque traité européen). Si l'accord intra-Belges n'est que cela, et si les 27 autres Etats membres acceptent la réserve belge sans la prendre à leur compte (ce qui est fort probable) alors le CETA va s'appliquer dans son entièreté sauf, sur certains points, en Wallonie voire en Belgique. Je pense que les 27 Etats vont accepter la réserve belge. Ils soutiennent le CETA et les USA font tout pour qu'il en soit ainsi (40.000 firmes américaines au Canada). La Commission sera bien obligée de suivre à moins qu'elle ne soulève des arguties juridiques pour tenter d'annuler la réserve belge qui souligne quand même certains dangers du CETA. Il faudra voir si le Canada acceptera aussi la réserve belge, mais c'est probable. Je pense que la majorité du Parlement wallon suivra Paul Magnette qui a toute sa confiance. Mais attendons encore un peu. Magnette va présenter sa lecture de l'accord au Parlement wallon. On en saura plus alors.

Raoul Marc Jennar

Lire aussi sur son blog :

La « petite » Wallonie plus peuplée que 7 Etats souverains de l’UE. Et plus démocratique que 27.

La Commission européenne adresse un ultimatum à la Belgique !