Ma survie, c’est la mort des autres
Par Le concierge du Musée le mercredi 15 novembre 2017, 10:11 - Quatrième nuit de Walpurgis - Lien permanent
Notre ami M. remarque encore, que d’une certaine manière, les embouteillages font leur retour en ce moment dans le quotidien de la ville d’Athènes. “Les gens, ceux ayant encore certains revenus, si possible fixes, les fonctionnaires par exemple, réadaptent leurs manières en la matière. Ils économiseront ailleurs et en réalité, ils se priveront, pour pouvoir éviter les rames bondées du métro et de Proastiakós (RER monoligne de la Région Attique). Ils veulent surtout éviter le contact, avec d’abord toute cette énergie négative des autres, puis, les agressions, les mendiants, les drogués, les vols, voire le bruit. Et aussi les grèves.”
“Puis, ils se rendent compte que même en voiture, leurs... périples deviennent de plus en plus tendus, comme jadis du temps où nos circulions en moto. Toujours en état d’alerte. Les gens conduisent comme si tous les autres n’existaient absolument pas. La société n’est plus, et elle devient de part ce fait de moins en moins fréquentable, sauf lorsque pour nos choix orientés, que et que j’appellerai ‘de niche’. Depuis plus d’un an, je rencontre ceux qui visitent les Monastères, puis les moines, leur spiritualité. J’y retrouve le calme, une posture sincère, une sorte même de catharsis psychique. Je peux mieux tenir le coup, mieux comprendre peut-être les autres, et... autant je dirais moi-même. Et ce n’est pas qu’une affaire de croyance.”
“Dans mon service, comme partout ailleurs dans la fonction publique depuis la crise, les gens sont devenus mesquins, rancuniers, rapporteurs, jaloux, filous et surtout mouchards. Tous nos salaires ont été diminués, sauf qu’ils ne sont pas identiques pour chaque les cas, alors, le grand jeu consiste à contester (symboliquement et parfois même par la voie officielle) les petits plus, ou avantages de tel ou tel collègue. Ils n’ont pas autre chose à faire, ils disposent du temps... libre, et surtout pour certains d’entre eux, le fait d’avoir intégré la fonction publique, est lié aux clientélismes des partis politiques. Ces gens ne savent pas faire autre chose... ainsi, ils chipotent autour d’eux, pour mieux accroître leur propre espace, telle est leur conviction la mieux profonde. ‘Ma survie, c’est la mort des autres’, sauf que nous n’irons guère très loin de la sorte.”
Pour P., l’épouse de M., tout est autrement plus simple. Elle travaille dans le privé à temps plein et alors miracle, son salaire est versé, “c'est alors un authentique privilège” comme elle dit, à ses yeux. “Je touche 650€ en net par mois, et pour une fois, nos rapports et interactions au travail ne versent pas forcement dans le négatif. Mon problème c'est qu’après le 20 de chaque mois, il ne reste plus rien de mon salaire, nous avons avec M., deux enfants, un foyer... une petite vie.”
Ce n’est pas de la complainte augmentée... devant la réalité sans doute, c’est plutôt que notre univers immédiat a pris ces rides, auxquelles très précisément nous n’avions pas pensé durant les premières années de la dite “crise”. Univers lequel n’est pas que de dimension politique, nous le savons aussi.
Notre ami D., insiste sur la décomposition alors totale du monde du travail. Et autant sur sa... recomposition inédite, où plus rien n’est comme avant. Salaires, conditions, enjeux, comme autant s’agissant de l’ambiance. Il a rigolé comme nous et comme les autres Grecs, des 720 millions d’euros que le pantin Tsipras se dit prêt à “distribuer aux plus nécessiteux, au bénéfice d’à peu près 3,4 millions de citoyens sous forme d'aide exceptionnelle”, d’après son annonce “solennellisée” au soir du 13 novembre (medias grecs du 13 et 14 novembre) . Cela fait en moyenne 211€ par personne concernée. Dimitri donc en rigole. En plus, cette aide est conditionnée suivant ce que les intéressés peuvent posséder en biens, notamment immobiliers. Ce qui peut ainsi en exclure pas mal de Grecs en réalité.
Extrait de l'article de Panagiotis Grigoriou paru sous le titre "Place aux jeunes" sur son blog Greekcrisis