L'Europe, c'est la paix !!!
Par Le concierge du Musée le mercredi 30 mai 2018, 23:17 - Quatrième nuit de Walpurgis - Lien permanent
On aurait pu croire que l’Union européenne et l’Allemagne s’offusqueraient de la position de la coalition M5S-Lega sur l’immigration. Le week end dernier nous a permis de comprendre que cette question était somme toute périphérique à côté de l’austérité budgétaire et des principes de la zone euro. Il y a 13 ans, les Français disaient non à cette Europe des grandes puissances financières et de l’ordolibéralisme allemand. Les Italiens se font désormais domestiquer par leurs maîtres outre-Rhin et leur commis Mattarella pour avoir été un peu trop critiques à l’égard de l’austérité et du fonctionnement de la zone euro.
Doit-on comparer la situation italienne avec le déroulement de la crise grecque ? Angela Merkel juge que oui. Celle-ci a en effet déclaré que la situation italienne allait bien entendu être problématique, mais que « comme à l’époque de la crise grecque et de Tsipras, il y a eu des problèmes, mais nous avons fini par nous accorder ». « Nous accorder » est donc le synonyme de faire capituler un leader démocratiquement élu, et de lui faire appliquer une austérité contraire au programme sur la base duquel il avait été propulsé au pouvoir. Voilà le sens de la démocratie selon Berlin. Si ce n’est pas assez clair, Angela Merkel a aussi déclaré : « Nous voulons collaborer avec tout le monde, mais il y a aussi des principes à l’intérieur de la zone euro ». A chaque crise, la rengaine qui consiste à déclarer, à l’instar de Jean-Claude Juncker, « qu’il n’y a pas de choix démocratique contre les traités européens » se réactive. Comme pour nous rappeler que nous vivons en régime de souveraineté limitée, et que l’on peut certainement débattre de la taille des haies et des abribus, mais en aucun cas de politique monétaire et budgétaire.
Au-delà des personnalités politiques allemandes, la presse s’en est aussi donnée à cœur joie. Comme l’a rapporté Libération, l’hebdomadaire des élites allemandes Der Spiegel a publié un éditorial dans lequel on explique que la Ligue et le M5S sont « des piques-assiettes » : « Comment pourrions-nous définir autrement le comportement d’un pays qui demande de financer le farniente et qui menace ensuite ceux qui sont sommés de régler leurs dettes ? Au moins, les clochards disent merci quand on leur donne quelque chose. » En Allemagne, on soumet les peuples d’Europe du Sud et on exige un sourire en retour. On compte sur les marchés aussi, puisque le commissaire européen Günther Oettinger a déclaré qu’il espérait que la panique financière pèserait dans le résultat des prochaines élections italiennes, déclenchant ainsi un tollé en Italie.
La France n’est pas bien plus courageuse. Emmanuel Macron a salué la décision de Sergio Mattarella de refuser de nommer Paolo Savona ministre de l’économie, considéré comme trop eurosceptique. Il y a vu un « grand sens de la responsabilité » et une décision courageuse, tout en lui renouvelant son soutien. Le courage consisterait donc désormais à bafouer les résultats d’une élection démocratique.
C’est toute l’Europe de la finance et de la soumission à l’austérité qui s’est activée ces derniers jours contre la coalition du Mouvement Cinq Étoiles et de la Lega, parce que ces forces voulaient proposer comme ministre de l’économie un économiste pourtant loin d’être subversif. Paolo Savona est en effet l’ex-président de la Confindustria, le MEDEF italien. Il est cependant l’un des auteurs d’un document publié en 2015 dans lequel il détaillait les dégâts de l’euro sur l’économie italienne, et les modalités pour en sortir. Il préconisait alors un plan secret de sortie de l’euro, dont la préparation serait dévolue à des experts en dehors de l’administration. De quoi suspecter la coalition gialloverde d’intentions cachées à l’égard de la zone euro, bien que Luigi Di Maio et Matteo Salvini aient déclaré à plusieurs reprises ne pas vouloir en sortir.
Lire la suite de l'article de Lenny Benbara paru sous le titre "3 ans après la Grèce, Berlin écrase les Italiens" sur le journal en ligne Le vent se lève