Il y a un an : Macron, c’est la “Troïka de l’intérieur”
Par Le concierge du Musée le dimanche 25 novembre 2018, 15:45 - ça se passe dans l'UE ! - Lien permanent
Yanis Varoufakis raconte que Schaüble (ministre des Finances allemand) lui aurait dit : “le véritable objectif c’est Paris, la Troïka veut imposer ses politqiues en France”. Si on accepte cette idée, c’est qu’effectivement l’étape suivante de l’Union Européenne consiste à se porter vers le lien où on trouve la pointe la plus avancée de l’Etat social sur le continent, c’est-à-dire vers nous.
Imposer à la cinquième puissance du monde une mise sous tutelle comme la Grèce, c’est irrecevable. La Grèce est la première colonie de la dette ; la société a été brutalisée comme jamais depuis la fin de la guerre civile en Grèce. En France, je pense que cette thérapie de choc peut être apportée non pas de l’extérieur, mais de l’intérieur. Comme le disait Galbraith, Macron représente en France la “Troïka de l’intérieur”. On se retrouverait avec une troika de l’intérieur : c’est Macron et son gouvernement technique. On ne peut pas apporter en France, comme en Grèce, des experts du FMI en cravate dans les hôtels parisiens pour importer leur politique. En revanche, on peut l’imposer de l’intérieur.
Je relisais le contenu du mémorandum de 2010 sur les modification du droit grec du travail ; ce qui est souhaitable dans ce mémorandum, c’est que les accords d’entreprise priment sur les accords de branche, que les procédures de licenciement soient allégées; on retrouve les mêmes attendus dans le programme de Macron.
Macron, c’est la “Troïka de l’intérieur” ; son but est de réduire l’Etat social, c’est de mettre en place ce que Noëlle Burgi nomme “l’Etat social minimal”, avec la transition de notre régime social de l’assurentiel vers l’existentiel. Cette purge-là, c’est le gouvernement technique de M. Macron qui va essayer de la mettre en oeuvre, par des mesures dures à l’égard de la population, du droit du travail, par de l’austérité. Il va le faire prudemment, car il est conscient du rapport de force. Mais la volonté de M. Macron d’obtenir l’assentiment de l’Allemagne peut nous amener, non pas à une “stratégie du choc” à la grecque, mais à un remaniement profond de la protection sociale et du droit du travail; à moins qu’entre-temps n’arrive l’inattendu, une secousse qui emporterait la zone euro et qui viendrait d’Italie.
Extrait d'Interview de Frédéric Farah parue dans Le vent se lève
Lire aussi : Ce qui arrive dans des endroits comme la Grèce n'a rien à voir avec la Grèce , qui constitue la dernière intervention progressiste[1] de Varoufakis avant sa conversion publique à "l'autre Europe" (qu'il avait mise en pratique en refusant toute sortie de l'euro et par son hostilité à l'audit de la dette grecque)
Pièce acquise par le Musée de l'Europe le 4 juillet 2017
Notes
[1] Le Concierge de l'époque, encore sous le choc des événements, n'avait semble-t-il pas bien lu ce texte en référence, appelant clairement à "plus d'UE" (une Europe fédérale donc), après avoir sacrifié la Grèce à l'euro, bien avant de choisir Hamon comme succursale de son mouvement DIEM25 en France. Sans vouloir l'excuser, on parlait encore de "capitulation de Tsipras" et non de trahison venant de loin, et Varoufakis n'apparaissait pas encore dans la vérité crue de l'homme qui avait sauvé ce qui était essentiel au Capital en vidant le programme de Syriza de sa substance avant même sa victoire, tout en faisant semblant de le défier, en fait d'essayer de le sauver contre lui-même... Note du Commissaire de l'exposition