«Alors oui, on est venu raconter ces histoires de travailleuses exploitées, parfois virées du jour au lendemain, alors qu’elles travaillent depuis plus de 30 ans. Dire que les rapports de productions sont garantis par une fourchette de lois au service des investisseurs aux dépens de la main d’oeuvre. Et qu’ils sont pour le moins asymétriques. Dénoncer des salaires humiliants : 300 dinars par mois (150 euros ndlr), avec parfois des familles entières en charge : 90% des femmes disent ne pouvoir en vivre décemment. On est aussi venus témoigner des conditions de travail, parfois sans issues de secours, sans réfectoires. Un tiers des filles interrogées souffrent de maux de dos, de poignets, de pieds. Et beaucoup de celles qui oeuvrent dans les ateliers du tannage et lavage bossent sans gants, sans masque et développent des maladies telles que des cancers. Pour éviter toute preuve de rapport au travail, les salaires sont souvent payés en espèces; les heures supplémentaires non payées. Quant aux logements, ils sont lamentables : des filles qui dorment parfois jusqu’à 5 ou 6 dans des endroits insalubres, parfois à même le sol sur des cartons, sans aucune aération. La seule façon d’améliorer leur sort, c’est d’informer. D’en parler. Et de les aider, parce que les syndicats sont encore trop souvent absents : moins de 10% sont syndiquées.»

Lire l'interview de Amani Allagui, coordinatrice du Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux, parue dans Libération