La Rose Pourpre de Tunis : «Ceci n’est pas un film»
Par Le concierge du Musée le mercredi 9 septembre 2015, 18:59 - Expositions - Lien permanent
Samedi 19 septembre 2015
POÈME 2 30, Rue d’Ecosse 1060 Bruxelles
Une activité de Smala Cinéma (ex-Cinéma Arenberg) en partenariat avec le théâtre Poème 2
POLITIQUE et CINEMA ? Interventions et rencontres
15H00 Benoit Eugène & Bendy Glu (Musée de l'Europe & de l'Afrique)
« Ceci n’est pas un film » : Cinéma et Contre-Révolution.
La « Révolution tunisienne » fut un soulèvement populaire massif péniblement capté par les élites néolibérales jusque là tenues en laisse par la famille régnante.
Les images ont joué un grand rôle pour effacer les classes oppressées (et toute pensée révolutionnaire) qui ont permis la chute de Ben Ali (car le Régime est toujours là) au profit d’une petite-bourgeoisie « bien de chez nous » (et qui cache la grande) prenant la pose à grand renfort de selfies (qui peuvent être des films bien subventionnés), dans laquelle nombre de militants, d’artistes etc… de l’autre rive ont pu se mirer romantiquement pour poser à leur tour en combattants de la liberté jaillis tout droit de l’iconographie de ce que certains osent encore appeler « la gauche » aujourd’hui.
Alors que les élites néolibérales « révolutionnent » l’Europe, en Grèce comme partout, il est prudent de sortir du film dont le Happy End s’écrit en lettres de sang, en plongeant dans le miroir en abyme tunisien. En espérant en sortir.
16h00 Jérémie Piolat (Auteur du « Portrait du colonialiste. L’effet boomerang de sa violence et de ses destructions » La Découverte, coll. « Les empêcheurs de penser en rond », 2011, auteur compositeur, interprète (Hydra), réalisateur et animateur d'ateliers vidéo à Bruxelles.
SYMPATHIQUES ÉNONCÉS… COLONIALISTES
A quoi est dû le fait qu'un Européen peut faire un film en Tunisie sur des Tunisiens ? L'inverse est-il pensable ? Il s’agit de problématiser ce qui semblerait devoir ou pouvoir à priori aller de soi : faire, montrer, regarder un film.
Ainsi, répondant à cette invitation, je proposerai une courte réflexion sur ce que je nomme les « énoncés colonialistes » :
Où, à la fin d'une conférence dansée sur la salsa cubaine, des occidentaux, en présence d'unemusique afro-latine, se laissent aller à des postures étranges et interpellantes relativement à l'idée absolument primitive et animale – au sens mécaniste - de la danse et de l'Afrique qu'elles énoncent.
Où des associations prétendant émanciper les migrants se révèlent, notamment « grâce » à l'affirmation de ce pouvoir d'émancipation, profondément sous humanisantes.
Il s'agit donc de penser certains énoncés – gestuels ou discursifs – à partir de leur mise en perspective avec le contexte de la réalité coloniale et son imaginaire.
Il s'agira également de se demander à quelle condition, travailler aux côtés de et avec les « indigénisés » peut se révéler, non émancipateur, mais, au moins, non vecteur de mort… Il pourra s'agir, enfin, peut-être, de voir s'il n'y a pas d'abord à penser ce que nous sommes nous-mêmes et pourquoi, dés que l'on s'approche des indigénisés, et des absences que le contact avec ces derniers révèlent de nos propres réalités ; absences héritées d'une histoire, pour partie, contre toute attente, commune (mais ceci reste encore à expliciter évidemment).
17h00 Débat : « REPRÉSENTER LA SOCIÉTÉ POUR COMPRENDRE ET AGIR » Avec Gwenaël Brees, Benoit Eugène, Isabelle Mathieu, Bernard Mulliez, Jéremie Piolat et Patrick Taliercio.
18h00 FACISM INC, Un film de Aris Hadjistéphanou, Grèce, 2014
« Etant donné que le fascisme ne se limite pas à Aube Dorée mais est également promu par des dirigeants politiques, des entrepreneurs et des éditeurs…
Etant donné que les conditions de la crise qui favorisent le fascisme nous entourent et ne sont pas derrière nous…
Etant donné que toute l’Europe s’enfonce rapidement dans l’obscurité de l’extrême-droite… »
Nous voyagerons de l’Italie de Mussolini à la Grèce pendant l’occupation nazie, la guerre civile et la dictature; et de l’Allemagne de Hitler au fascisme moderne en Grèce et en Europe. Ce nouveau documentaire suivra les traces de Debtocracy et de Catastroika, qui décrivaient les causes de la crise de la dette, l’impact des mesures d’austérité, l’érosion de la démocratie et le bradage des richesses du pays..
20h00 - Avant-première
LE BARBIER DE TUNIS (en présence de l’équipe du film) de Bernard Mulliez, en collaboration avec Benoit Eugène, 2015, 114’
Film carnet de voyage tourné en mars 2012, plus d’un an après la chute de Ben-Ali. Les Tunisiens découvraient l'exercice de la démocratie et de la liberté d’expression longtemps confisqué par les anciens régimes. Benoit Eugène et Bernard Mulliez rassemblent une suite de portraits aux multiples facettes. Au rythme des interviews émerge la doxa libérale dévolue à la compétitivité qui maintient bas les salaires des travailleurs et accorde l’exonération fiscale aux investisseurs étrangers.
Au travers de ce paysage social urbain fortement hiérarchisé, notre vision de la "révolution arabe" se complexifie déjouant l’antagonisme réducteur du conflit d’identité politicomédiatique instauré opposant les Lumières de la modernité à l’obscurantisme islamique.
Loin de la machine à laver médiatique sur les « révolutions » arabes, loin des miroirs dans lesquels se regarde les « droits-de-l’hommistes » libéralisés, enfin une Tunisie concrète. Un vrai regard sur le réel tunisien. Et, la (re)découverte que la lutte de classes - eh oui ! - ça existe.