Piller la Grèce
Par Le concierge du Musée le dimanche 9 août 2015, 11:13 - Quatrième nuit de Walpurgis - Lien permanent
L’accord du 12 juillet entre la Grèce et les autorités européennes confine le pays à un statut néo-colonial, c’est-à-dire, à devenir un protectorat de la troïka (Commission Européenne, Banque Centrale Européenne, Fonds Monétaire International).
L’accord demande au gouvernement grec d’annuler tous les projets progressistes légiférés par Syriza depuis son arrivée au pouvoir il y a 6 mois ; de recevoir l’approbation de la troïka avant de décider de nouvelles lois ; d’adopter des mesures d’austérité automatiques en acceptant des “coupures de dépenses gouvernementales quasi-automatiques” au cas où les objectifs de surplus budgétaires ne seraient pas atteints ; d’accélérer la saisie et la liquidation de commerces et de résidences qui ne peuvent pas payer leurs dettes ; et d’affaiblir, ou même éliminer, les normes du travail protégeant les recours collectifs par des employés.
Mais la clause peut-être la plus humiliante est celle qui force la Grèce à privatiser la somme effarante de €50 milliards de biens publics. Ceux-ci seront vendus à des investisseurs privés, dont plusieurs seront des étrangers.
Les fonds ainsi récoltés seront utilisés pour rembourser la dette du gouvernement et recapitaliser les banques, ainsi que pour de l’investissement en Grèce, bien qu’il pourrait ne pas rester tant d’argent pour ce dernier objectif.
L’accord a été décrit comme étant « une vente de garage désespérée de tout ce que peut trouver la Grèce. » Un conseiller du gouvernement grec l’a ainsi résumé : « Il s’agit en fait de vendre la mémoire de nos ancêtres, de vendre notre histoire. »
En particulier, l’accord mentionne explicitement que l’opérateur du réseau de transmission électrique (ADMIE) se doit d’être privatisé, et sera probablement acheté par des intérêts étrangers.
Le fonds qui gèrera le processus de privatisation se trouvera en Grèce, mais en pratique sera contrôlé par la troïka.
Ce n’est pas la première fois que les autorités européennes tentent de conclure un pareil accord. En 2011, Athènes avait aussi entrepris, avec la troïka, de privatiser de nombreux biens publics d’une valeur totale de €50 milliards, mais cette cible n’avait pas été atteinte, alors que seulement €3.2 milliards de biens avaient été privatisés. Il est donc peu probable que la somme soit atteinte cette fois-ci, mais elle demeure toutefois révélatrice des intentions de la troïka.
Il demeure aussi peu probable que des trésors archéologiques comme l’Acropolis soient soumis à une vente, étant donné la fureur que cela soulèverait auprès de la population. Cependant, deux politiciens allemands ont récemment suggéré que même ce genre de biens devrait faire partie de la vente de feu, donc on ne sait jamais. Des ruines moins importantes, par contre, pourraient bien être vendues.
Pour comprendre à quel point l’accord révèle l’agressivité de la troïka, il convient d’examiner ce qu’il contient exactement. Un bon endroit à cet égard est le site internet de l’agence établie en 2011 pour superviser le processus de privatisation de €50 milliards précédent. Elle s’appelle la Hellenic Republic Asset Development Fund (HRADF, Fonds de développement des biens de la République hellénique) et son site fascinant liste tout ce que la Grèce doit vendre, avec photos, cartes géographiques et descriptions.
Il s’agit d’un réel marché aux puces, où l’on peut trouver monuments, plages ensablées, aéroports, ports, services postaux, services publics, et plus. Et le site est en anglais : après tout, les investisseurs étrangers se doivent de savoir ce qu’ils s’apprêtent à acheter.
Voici un échantillon. Les prix ne sont pas indiqués, mais j’inclus une brève description des biens tirée du site officiel...
Lire la suite de l'article de Julien Mercille sur le site du CADTM