Musée de l'Europe et de l'Afrique

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jeudi 25 février 2016

Tunisie : en 2015, 105 personnes se sont immolées

« On en a marre des immolés et de leurs revendications ! Vous voulez mourir ? Jetez vous par les fenêtres ! buvez du poison ou noyez vous dans un fleuve ! » crie le médecin du centre de traumatologie et des grands brûlés de Ben Arous . « Les jeunes doivent arrêter de faire ce chantage suicidaire ! Celui qui veut mettre fin à sa vie, qu’il le fasse chez lui et pas sur la place publique ! » a osé une journaliste sur le plateau d’un talk show. « Si tu es un homme ! Fais comme Bouazizi et montre nous ton courage ! » a lancé un policier à un vendeur ambulant qui menaçait de s’immoler à Sousse.

Lire l'article de Henda Chennaoui paru sous le titre « On en a marre des immolés et de leurs revendications » sur le site Nawaat.

jeudi 17 décembre 2015

L'ultralibéralisme au service du terrorisme en Tunisie

La conduite par l’Etat d’une politique antisociale et ultralibérale peut-elle le rendre efficace dans son combat contre l’islamo-terrorisme?

Par Mohamed Chawki Abid Ingénieur économiste, Tribune parue dans Kapitalis

Depuis 2011, les gouvernements désignés ou soi-disant élus ont tous été consentants quant à la prise en charge des diktats des organisations financières internationales (Banque mondiale et Fonds monétaire international) ainsi que des consignes du tandem Etats-Unis – Union Européenne. Ceci les a conduits à tourner le dos aux revendications sociales les plus légitimes, pour engager le pays sur la voie d’un libéralisme dérégulé, accompagné d’un surendettement à la fois improductif et conditionné.

Corruption et pauvreté

Ce faisant, la malversation et la corruption ont prospéré; les instances de contrôle et de surveillance ne sont plus écoutées; l’appareil judiciaire s’est grippé; la fraude fiscale a été vulgarisée; les infractions douanières ont été banalisées; la fuite de capitaux s’est développée; l’endettement extérieur a explosé; les prédateurs ont été innocentés; et les malfaiteurs ont été récupérés par les partis politiques.

Parallèlement, le périmètre de la pauvreté s’est substantiellement élargi; les disparités régionales se sont amplifiées; les injustices sociales se sont aggravées; les inégalités de revenus se sont accentuées; l’iniquité fiscale s’est accrue; l’inflation s’est envolée; et le pouvoir d’achat s’est écrasé.

Par conséquent, les miséreux se sont laminés; les employés se sont appauvris; les chômeurs se sont faits enrôler dans l’islamo-terrorisme; les contribuables disciplinés ont succombé à la pression fiscale; les ménages ont croulé sous le poids croissant de la dette, les désespérés n’hésitent pas à se suicider; etc.

Alors que les fraudeurs se sont enrichis, les prédateurs ont politisé leur argent, les rentiers se sont engraissés, et les contrebandiers sont devenus des princes influents et gouvernants.

Le terrorisme embarqué

Pour ce qui des indicateurs macroéconomiques, jamais la Tunisie n’a atteint ce niveau de contreperformance : récession économique, désinvestissement public, dérapage périlleux de la balance commerciale, désertification industrielle, précarité et suppression d’emplois, aggravation du stress hydrique, insuffisances budgétaires, déficits extérieurs, surendettement improductif, etc.

A présent, l’Etat s’est engagé dans une guerre contre un «terrorisme embarqué» dont les centres de décision sont à des milliers de kilomètres, et dont les milieux de culture prospèrent proportionnellement au développement de la misère et à la montée de l’exaspération populaire.

Enfin, quand le taux de suicide des jeunes ne cesse d’accroitre, dans les écoles les campagnes et les quartiers déshérités, que pourrait-être la probabilité de recrutement d’un jeune malheureux désespéré pour une opération kamikaze?

samedi 14 novembre 2015

A quoi sert le patronat ?

En Tunisie l’Etat-parti s’est spécialisé, dès le départ, dans la fonction d’Etat-patron pesant de tout son poids sur la conduite des affaires publiques et sur la régulation de l’activité économique avec ce que cela comporte d’autoritarisme, d’arbitraire, d’absence de légitimité, d’embrigadement, de propagande et de contrôle de toutes les institutions et corps politiques et sociaux.

Ainsi toute association et toute organisation ayant pour but la défense d’intérêts économiques est déclarée inutile, hostile même, puisque l’État se considérait comme étant le père commun de tous. Syndicats autant que représentants du secteur privé se retrouvaient pour ainsi dire à sa solde et à sa merci. Entrave à l’action syndicale par la corruption personnelle de ses notables, par la subordination de ses chefs et par l’emprisonnement de ses militants; soumission et servitude des patrons d’entreprises privées par l’octroi de protections, de privilèges et de passe-droits dans l’unique but de préserver la paix sociale et d’assurer la stabilité politique.

Depuis l’indépendance, hommes d’affaires et patrons d’entreprise ont réussi à bien profiter des politiques économiques successives, que ce soit à travers le modèle de développement économique par substitution aux importations ou grâce à la libéralisation et la privatisation de l’économie dans le cadre des réformes d’ajustement structurel et de mise à niveau des entreprises.

Le secteur privé ne représentait pas seulement un groupe social informel mais une institution particulière, l’Union tunisienne de l’industrie, du commerce et de l’artisanat (Utica), de sorte que, dans le jargon courant, patronat est devenu synonyme d’Utica. Peu importe que l’on soit industriel, commerçant, artisan, détaillant, boucher ou boulanger, drapier, orfèvre ou épicier, petits, grands, ou moyens, on est tous, avec ou sans salariés, des patrons, formant ensemble une communauté dans la société: le patronat. Sous ce nom conventionnel il faut comprendre non seulement les employeurs, patrons au sens étroit, mais l’ensemble des personnes qui travaillent à leur compte, employeurs ou indépendants sans salariés. Etre patron cela veut dire être maître chez soi. Que l’on n’ait que peu d’employés ou même pas d’employé, on est patron quand on possède une affaire, fût-elle modeste.

Une docile et reconnaissante créature de l’État

L’Utica, dont les adhérents sont une multitude de fédérations clientélistes jalouses de leurs intérêts, n’a aucune légitimité historique, ayant été dès le départ une docile et reconnaissante créature de l’État. En tant qu’organisation patronale, elle a servi d’auxiliaire de l’appareil de pouvoir et ses dirigeants furent tous d’actifs membres du parti. En tant qu’instance privilégiée de l’idéologie de la mise au pas, elle a amplement profité des largesses publiques, bénéficiant d’aides et de gratifications diverses en contrepartie de son engagement à servir de rouage essentiel de la politique d’ordre et de paix sociale. Elle fut en cela la fidèle instance – souvent contrainte et forcée – pour la collecte des contributions des entreprises aux 26-26, le porte-voix assumé de la propagande du régime pour toutes les politiques économiques menées par les artisans du «changement» et un entremetteur important entre l’oligarchie et le politique.

La mobilisation populaire du 14 janvier 2011 a balayé le régime, mais elle n’a eu ni la densité sociale ni la capacité politique pour ouvrir un cycle radicalement différent de développement. Il ne pouvait en être autrement après tant d’années de pouvoir conduit par un régime qui a fragmenté la classe laborieuse, liquéfié le pouvoir social de la classe moyenne, transféré un pouvoir immense au secteur des affaires et imposé un paradigme idéologique et culturel de consommation. Un régime qui a opéré un fort processus de dépolitisation et de désidéologisation de la vie nationale en éliminant tout débat sur la politique économique.

Certaines entreprises ont pu à ce point être favorisées par les dispositions autoritaires du régime précédent qu’elles regrettent la perte de leurs rapports privilégiés avec les décideurs dotés d’un pouvoir discrétionnaire. Les choses ont changé pour elles depuis cette époque dorée et il ne serait pas prudent de devenir mélancoliques au sujet du bon vieux temps.

(...)

C’est d’ailleurs en termes d’adaptation qu’il faut comprendre la large campagne de communication de l’Utica ainsi que les propos exprimés par sa présidente dans les médias révélant la capacité de l’organisation à s’ajuster, et c’est un euphémisme, à la nouvelle réalité. A commencer par un évident et non moins indécent souci de plaire aux islamistes ou simplement pour se conformer aux mœurs du moment. On se rappelle tous le congrès de l’Utica sous le gouvernement de l’islamiste Jebali. Les organisateurs avaient ouvert la cérémonie par une inhabituelle psalmodie du Coran comme il est d’usage pour sacraliser tout acte notable en y appelant la bénédiction divine. Quant aux propos, on les prendrait pour les meilleures intentions du cœur et de l’esprit, pour une parfaite droiture, une noble générosité, un sincère dévouement à ce pays, n’eut été ce lourd fardeau de fautes, d’erreurs et de compromissions que les patrons traînent péniblement et qui embarrassent encore leur initiation à la démocratie.

Ces récits tardifs de Wided Bouchamaoui, présidente de l’Utica, qui n’a même pas l’habilité rhétorique de masquer ses idées, ne diffèrent pas des propos tenus à l’époque par son prédécesseur, Hedi Djilani, grand thuriféraire du régime déchu et auquel elle a rendu un vif hommage. On croyait les chefs d’entreprises des gens pragmatiques, nets, précis, ennemis des utopies et des chimères, attributs des politiciens. On les a retrouvés fabricants d’illusions à travers 100 recommandations de teneur surréaliste.

Autorité, propriété, hiérarchie, ordre et profit

Encore une fois, leur système de valeurs qui n’a jamais cessé de tourner autour de l’autorité, de la propriété et de la hiérarchie, garants de l’ordre, de la stabilité et du profit, semble prêt à s’accommoder avec toutes les idéologies qu’elles soient d’obédience islamistes ou laïques.

La démocratie ne pourra être consolidée dans ce pays que si les détenteurs de fortunes personnelles ne cèdent pas, encore une fois, à la tentation de s’acoquiner opportunément avec tout nouveau maître toujours prêts à défendre l’ordre social établi comme un ordre sacré.

La démocratie ne sera vraiment ancrée et irréversible que si le secteur de l’entreprise privée se montre plus intègre et plus convaincant en tant qu’agent de développement économique et plus fiable comme garant des institutions démocratiques qu’il ne l’a été par le passé. Autrement dit qu’il procède à sa propre autocritique. Or que constatons-nous? Que la chute du régime n’a pas agi en traitement de choc ni constituée une rupture brutale entre le bon vieux temps de l’entreprise protégée et soumise, celle des connivences et de la sous-traitance et les nouvelles conditions du pays. Si on s’adapte politiquement on demeure éthiquement bien en-deçà du requis : respect de la règle de droit, comptabilité transparente, transactions loyales qui reposent sur la confiance et la compétence. Pour y arriver, les chefs d’entreprise doivent surmonter d’abord la crise à l’intérieur de leurs propres rangs, reconquérir leur dignité perdue et changer. Mais changer impliquerait une transformation culturelle, un changement de valeurs et de principes, d’être digne de représenter le monde économique, de défendre les commerçants et les chefs d’entreprise et se battre à leur côté, de marquer les politiques à la culotte pour les stimuler et les faire agir en faveur de l’économie sans essayer de les imiter ou de les remplacer.

Alors non, décidément l’Utica ne sert pas à grand-chose, si ce n’est à dévaloriser l’image des vrais entrepreneurs – si tant est qu’ils en existent. En prétendant exprimer la voix des patrons, de la société civile, de la nation, des institutions et de la démocratie, sa présidente se retrouve malgré elle la surprenante lauréate d’une reconnaissance sans dimension, restée toujours dans le flou, refusée plusieurs fois au Mahatma Gandhi, bizarrement attribuée à Obama, étrangement octroyée à Mohamed El-Baradei, tellement sous-estimée qu’elle a été rejetée avec mépris par Jean-Paul Sartre mais qui n’empêchera sûrement pas la présidente de l’Utica d’entériner en fait le sempiternel credo à travers lesquels le patronat n’a jamais cessé de penser, d’agir et de s’organiser.

Pourvu que les affaires continuent.

Article partiellement reproduit de Yassine Essid, paru dans Kapitalis

lundi 19 octobre 2015

Que récompense le prix Nobel de la paix ?

La célébration par le prix Nobel du rôle politique de l’alliance «des ouvriers et des patrons» que représente la collaboration entre l’UGTT et l’Utica dans le dialogue national sonne dans les faits comme un avertissement adressé à toutes les fractions des classes populaires et moyennes portées par l’espoir d’une vie plus juste et plus digne.

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La nomination du Dialogue national tunisien, dirigé par un quartet regroupant la puissante organisation syndicale, l’Union générale tunisienne du travail (UGTT), l’Union tunisienne de l’industrie, du commerce et de l’artisanat (Utica, syndicat patronal), la Ligue tunisienne des droits de l’homme (LTDH) et l’ordre des avocats au prix Nobel de la paix pour 2015 a provoqué, en Tunisie comme à l’étranger, un concert de louanges et d’autosatisfaction. Rappelons les faits. Après les élections d’octobre 2011, qui ont amené le parti islamiste Ennah-dha à exercer le pouvoir aux côtés de deux autres partis (la troïka), l’Assemblée nationale constituante et le gouvernement ont été la cible de critiques de plus en plus acerbes. Au moment où l’Egypte du maréchal Al-Sissi liquidait l’expérience de l’alternance, en Tunisie, la multiplication des assassinats politiques et l’incurie du gouvernement ont nourri une contestation sans précédent, faisant vaciller la légitimité de la troïka. A l’initiative d’un Front de salut national composé du parti Nidaa Tounes (nébuleuse conservatrice composée en grande partie de cadres de l’ancien régime) et du Front populaire (extrême gauche), le sit-in du Bardo a ainsi exigé, au cours de l’été 2013, la chute du gouvernement et la dissolution de l’Assemblée. Trois groupes, revendiquant chacun un type de légitimité, se sont ainsi affrontés : les islamistes et leurs alliés, forts de leur légitimité électorale ; les organisations protestataires et les mouvements sociaux, qui se glorifiaient d’une légitimité révolutionnaire ; les caciques de l’ancien régime et une partie de la gauche partisane, qui invoquaient la légitimité consensuelle pour sortir de la crise et revenir au pouvoir.

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dimanche 13 septembre 2015

Derrière le projet de loi de réconciliation, Fathi Abdennadher, le juriste à tout faire de Ben Ali

Le nom de Fathi Abdennadher ne vous dit pas grand-chose et pourtant! Introuvable le jour où Ben Ali est tombé, ce juriste rôdé au traficotage des textes juridiques et aux tricheries électorales, reprend du service. Un document obtenu par Nawaat prouve sa complicité dans l’élaboration du projet de loi contre-révolutionnaire de réconciliation économique et financière, cousu dans l’antichambre du palais de Carthage, sous la houlette de Ridha Belhaj dir-cab de BCE.

Le 15 janvier 2011, Fathi Abdennadher est toujours président du Conseil constitutionnel, là où a été fomenté la “mascarade démocratique” de Ben Ali. C’est lui qui doit annoncer, la mort dans l’âme, que Foued Mebazaa est président de la République, après avoir disparu dans la nature, pendant la longue nuit du 14 janvier.

Les acrobaties constitutionnelles, il s’y connait. Président du Conseil constitutionnel de 1999 à 2005, c’est lui qui valide, la modification de l’article 39 de l’ancienne Constitution, approuvée par référendum le 26 mai 2002, pour ouvrir la voie à la réélection du candidat Ben Ali qui peut se représenter à deux reprises, en 2004 et en 2009.

Le 29 juin 2010, c’est lui, également, qui déclare “constitutionnelle” la loi n° 2010-35 complétant les dispositions de l’article 61 bis du code pénal pour réprimer la société civile. Un article unique compose cette loi : « Il est ajouté un deuxième paragraphe aux dispositions de l’article 61 bis du code pénal ainsi libellé : Article 61 bis – (paragraphe deux) – Est coupable de la même infraction visée au paragraphe précédent et puni des mêmes peines prévues à l’article 62 du présent code, tout tunisien qui aura sciemment établi, directement ou indirectement, des contacts avec des agents d’une puissance, d’une institution ou d’une organisation étrangère dont le but est d’inciter à porter atteinte aux intérêts vitaux de la Tunisie. Est considéré comme intérêt vital de la Tunisie tout ce qui se rapporte à sa sécurité économique. »

En avril 2012, c’est encore lui qui fait l’objet d’une enquête judiciaire sur la disparition d’une partie des documents administratifs du Conseil constitutionnel. Inculpé, selon les articles 32 et 100 du code pénal, il ne sera pas condamné.

En 2015, cet anticonstitutionnaliste récidiviste ressurgit de l’ombre pour proposer ses talents de charcuteur ès-Droit afin de saper les fondements de la justice transitionnelle.

Lire la suite de l'article de de la rédaction de Nawaat

Tunisie: les logements sociaux constituent 1,6% du parc immobilier

Salma Hamza, urbaniste et membre du comité de soutien explique :

"Aujourd’hui, la classe moyenne est complètement marginalisée du système de production et d’accès au logement. En effet, les dispositifs d’aide qui lui étaient dédiés sont complètement détournés au profit d’autres catégories sociales plus aisées. Les logements dits sociaux qui de par leur conception et de leur système de financement sont plus adaptés à des catégories moyennes, car bancables et solvables, ont été pervertis par le clientélisme de toute sorte. Aujourd’hui, ces mêmes structures de production du logement sont en crise de reproduction et menacées elle mêmes de disparition à cause des prix du foncier complètement déchaîné et d’une incapacité des pouvoirs publics à aborder sérieusement la question du logement sous toutes ses formes."

Selon le ministère de l’Équipement, de l’Aménagement du territoire et du Développement durable, 30% de la population ne disposerait pas de moyens pour accéder à un habitat décent et 20% n’aurait aucune chance d’avoir un logement digne. Alors que l’État se désengage, progressivement du secteur (les logements sociaux constituent 1,6% du total des logements construits), près de la moitié des Tunisiens n’a pas accès à un logement décent. Menacés dans leur dignité, les candidats aux logements sociaux souffrent de la faiblesse de l’Etat en tant que régulateur du marché de l’habitat et des caisses sociales qui déclinent leurs demandes sous prétexte de leur insolvabilité.

Lire l'article d'Henda Chennaoui paru sur le site Nawaat sous le titre "Halima Jouini en grève de la faim : « Un logement décent pour tous »"

Le droit de manifester, l’état d’urgence et l’imposture de l’État

Le 27 août 2015, des jeunes indépendants et des activistes de la société civile lancent la campagne #Manich_Msamah (Je ne pardonne pas). Dès son démarrage, elle a pu se décentraliser en formant des coordinations régionales dans les différents gouvernorats. La vague de protestation a atteint plus de 15 villes, en deux semaines.

Ceux qui défendent la violence policière contre les manifestants, brandissent l’état d’urgence comme justificatif, arguant que ces manifestations empêchent les forces de l’ordre de s’atteler à la lutte contre le terrorisme. Paradoxalement, le gouvernement semble profiter de la situation sécuritaire, pour prendre d’une manière unilatérale et donc sans concertation, des décisions stratégiques qui engagent l’avenir.

Blackout médiatique, blocus sécuritaire, neutralisation de l’opinion publique, minimisation de la portée du mouvement protestataire et bras de fer avec les partis de l’opposition ne peuvent qu’éveiller les doutes sur l’intention du pouvoir d’adopter en catimini des lois tout en évitant les critiques de fond du projet de la loi de la réconciliation économique, cœur du litige.

Invoquant l’état d’urgence, Mohamed Najem Gharsalli, ministre de l’Intérieur, a déclaré hors la loi, la marche nationale prévue pour le samedi 12 septembre à l’avenue Habib Bourguiba. Désavoué pendant quelques heures par le chef du gouvernement, qui à l’issue d’une rencontre avec des partis de l’opposition extra-parlementaire aurait autorisé la manifestation, le ministre de l’Intérieur sera finalement conforté dans sa décision par un communiqué officiel diffusé jeudi 10 septembre par la présidence du gouvernement.

Pas plus tard que le 9 avril 2012, Ceux qui avaient attaqué le mouvement Ennahda quand il avait décidé de fermer l’avenue Habib Bourguiba devant les manifestants pour des raisons sécuritaires, légitiment aujourd’hui, la violence à l’encontre des manifestants. A l’époque, le débat politique et médiatique était centré autour de la question de la reconquête de l’Avenue Habib Bourguiba comme symbole de la Révolution du 14 janvier. Pour des raisons sécuritaires la symbolique de l’Avenue se trouve, encore une fois, confisquée par un gouvernement qui n’aurais pas pu accéder au pouvoir sans la contestation dans la rue.

Lire l'intégralité de l'article de Mohammed Samih Beji Okkez, paru sur le site Nawaat sous le titre "#Manich_Msamah : Les mouvements de protestation entre le 27 août et le 8 septembre"

jeudi 10 septembre 2015

Nomination des gouverneurs : Le retour de l’Etat-Parti

Mardi 25 août 2015, les nouveaux gouverneurs ont prêté serment devant le président de la République Béji Caïd Essebsi. Le chef du gouvernement et le ministère de l’Intérieur ont annoncé trois jours plutôt la nomination de onze nouveaux gouverneurs et le changement d’affectation pour trois autres. Au sein de la coalition au pouvoir, ces nominations ont été accueillies avec tiédeur, voire circonspection, à l’instar du mouvement Ennahdha et Afek Tounes. Sur les réseaux sociaux, une vague de contestation a dénoncé le retour en force des seconds couteaux de l’ancien régime.

Lire l'article de Mohammed Samih Beji Okkez paru sur le site Nawaat.

mercredi 2 septembre 2015

"Ils m'ont tellement électrocuté que je pourrais éclairer tout un bâtiment"

Tunis 1er septembre 2015

Mettre fin aux abus (sic!) sécuritaires

Après la diffusion de la vidéo « Tfarjou Fina TORTURE » produite par l’association Forza Tounes qui donne la parole à des jeunes racontant par le menu les provocations, la torture, les arrestations arbitraire, le chantage… qu’ils ont subis.

ForzaTunis.PNG cliquer pour voir la vidéo sous-titrée en français

Face à la persistance des abus et des séances de tortures dans les lieux de détention en l’absence de sanctions effectives de la part de l’autorité de tutelle…Les associations et organisations de défense des droits de l’Homme signataires de ce communiqué exigent :

L’ouverture immédiate d’une enquête sérieuse tenant compte des témoignages recueillis dans la vidéo, des plaintes contre des pratiques de torture et des mauvais traitements et violations des droits de l’Homme.

Des sanctions contre tous ceux qui se sont adonnés à ces pratiques humiliantes et le dédommagement des victimes pour en finir avec le fait accompli de l’impunité.

Les associations et organisations signataires :

Considèrent que la persistance de ces pratiques traduit le manque de sérieux (sic) dans la lutte contre ce lourd héritage d’ancien régime et l’absence d’une vision globale (sic) pour l’éradication de cette « culture » qui institutionnalise la torture, l’extorsion des aveux par la force et la violation de la loi par les représentants de la loi.

Elles rappellent au gouvernement que l’État tunisien est tenu, de par ses engagements nationaux et internationaux, de combattre la pratique de la torture et toutes les formes d’humiliation et d’en punir les auteurs.

Les associations et organisations signataires tiennent à affirmer avec force que le tout répressif en lieu et place d’une stratégie de dialogue et d’un projet national d’intégration de la jeunesse marginalisée, c’est la porte ouverte (sic) à toutes les aventures : l’extrémisme, la violence et les barques de la mort, comme en témoigne la vidéo.

Signataires :

Syndicat Nationale des Journalistes Tunisiens - SNJT Réseau Euro-Med des Droits de l’Homme – REMDH Association Tunisienne des Femmes Démocrates – ATFD Association Vigilance pour la Démocratie et l’Etat Civil – Yaquadha Comité pour le Respect des Libertés et des Droits de l’Homme en Tunisie – CRLDHT Forum Tunisien des Droits Economiques et Sociaux – FTDES Fédération des Tunisiens Citoyens des deux Rives – FTCR Organisation 10-23 de Soutien au Processus de la Transition Démocratique

Contact : Messaoud Romdhani – 00 216 97 322 921 – mah.talbi@gmail.com

Les "sic" sont du Concierge...

dimanche 30 août 2015

«Nous n’accepterons jamais la méthode proposée pour classer les dossiers de corruption»

« Une commission clandestine de réconciliation économique et financière ». Voilà comment la coalition civile contre la loi de réconciliation qualifie la commission que Béji Caid Essebsi propose de gérer les dossiers de corruption et « tourner la page » en « urgence ». Dans ce que les opposants appellent désormais « la guerre déclarée du Président contre la justice transitionnelle », le projet de loi organique n°49 lié à la réconciliation dans le milieu économique et financier ne cesse d’alimenter un débat houleux entre une minorité résistante et une majorité partisane. Lors d’une conférence de presse, tenue à Tunis, jeudi matin 27 août, par la coalition civile contre le projet de loi de la réconciliation, Le juge démissionnaire du tribunal administratif, Ahmed Soueb, ainsi que Abdeljelil El Bedoui ont exposé les défaillances du projet de loi aux niveaux constitutionnel, juridique et économique.

Lire l'article d'Henda Chennaoui paru sur le site Nawaat

mercredi 26 août 2015

« Regagnez vos positions ! »

Empruntée au langage martial, l’expression peut paraître excessivement belliqueuse. Elle n’en est pas moins devenue un mot d’ordre, partagé depuis peu par de nombreux internautes, d’anciens compagnons de lutte d’avant 14 janvier 2011. C’est que le projet de loi dit de réconciliation économique, porté par la présidence de la République, point d’orgue d’une batterie de lois droitières, a touché à l’essence même de la révolution tunisienne, son ADN, en cherchant à restaurer un système corrompu sans passer par la case Vérité.

Lire l'article de Seif Soudani paru sur le site Nawaat

mercredi 19 août 2015

Tunisie: Projet de loi blanchissant la corruption sous Ben Ali

Le projet de loi organique de réconciliation dans les domaines économique et financier devrait être examiné à l’Assemblée des représentants du peuple à la rentrée parlementaire, à partir du 27 août prochain. Si, comme le prédit désormais Rached Ghannouchi, « la loi passera après quelques amendements », la force de frappe de la nouvelle majorité parlementaire (près des trois quarts théoriques des députés) cache mal un isolement croissant de certaines élites politiques sur cette question précise, épineuse, et éthiquement polémique.

L’Instance Vérité & Dignité a essentiellement cinq mandats et autant de commissions spécialisées, dédiées à leur réalisation. Toutes sont menacées par le projet de loi organique relatif aux « dispositions particulières concernant la réconciliation dans le domaine économique et financier », un texte dont les auteurs prétendent qu’il ne touche qu’un aspect unique de la justice transitionnelle, mais qui interfère en réalité dans l’ensemble des missions imparties à l’IVD.

L’article 12, le plus dangereux de ce texte de loi, stipule expressément que :

Sont abrogés tous les articles liés à la corruption et la spoliation des deniers publics contenus dans la loi de décembre 2013 relative à la justice transitionnelle.

L’un des principaux mandats de la commission investigation et recherche consiste à faire la lumière sur les violations massives des droits humains. Or, le moteur de la machine dictatoriale s’articulait en Tunisie précisément autour de la corruption, l’ancienne dictature n’étant pas régie par une quelconque idéologie, contrairement à d’autres régimes autoritaires. Son objectif était de capter les richesses de l’Etat vers une fraction de la société.

Par conséquent, cette première commission ne pourrait plus examiner les plaintes lui parvenant, ayant un lien direct avec un acte de corruption au départ et qui finit, comme souvent, par un acte de violation des droits humains.

Lire l'article de Seif Soudani paru sur le site Nawaat.org sous le titre "L’arbitrage économique, ou l’arbre qui cache la forêt"

dimanche 16 août 2015

Tunisie : vers la normalisation de la torture au nom de la lutte anti-terroriste

Environ vingt personnes ont été torturées entre juillet et début août 2015 dans les prisons, centres de détention et même dans la rue. Un chiffre que des organisations de la société civile ont recensé sans réussir à donner une liste exhaustive des dépassements et violations des droits de l’Homme commis par les forces de l’ordre durant la même période. Depuis la déclaration d’une guerre acharnée contre le « terrorisme », les observateurs ne cessent de noter une montée considérable de la violence policière. D’un autre côté, les décideurs du pays ne semblent pas trouver un équilibre entre la démocratisation du pays et la lutte anti-terroriste.

Lire l'article d'Henda Chennaoui sur le site Nawaat.org

mardi 11 août 2015

Trahison des clercs en Tunisie

trahisondesclercs.jpg

Ainsi ai-je noté dans la suite de l'affaire du prétendu kidnapping et torture de 7 individus soupçonnés de terrorisme, l'empressement systématique de nos intellos à s'en remettre à la version officielle. Je note le cas de l'universitaire Raja Ben Slama par exemple, qui s'en prend carrément aux sceptiques et les accuse de défendre le terrorisme : "Le terrorisme a ses défenseurs. Ils appellent l'arrestation kidnapping. Les terroristes seraient au dessus des lois. Les médias relaient leurs allégations. Le terrorisme profite d'une justice complaisante et de médias aux ordres" (écrit le 5 Août sur sa page FB). Cette dame ignore le concept de présomption d'innocence et semble beaucoup plus outrée par les avertissements des sceptiques que par l'usage probable de la torture.

Ceci n'est qu'un exemple parmi tant d'autres illustrant une tendance générale qu'il est difficile d'expliquer. Est-ce la peur maladive de tout ce qui porte une barbe qui appauvrit leur raisonnement ? Est-ce la loyauté aveugle à l'ordre bourguibiste ? Est-ce leur nostalgie inavouée au Benalisme ? ...

Lire l'article de Z sur son site Debat Tunisie sous le titre "Le barrage de la Révolution cède"

dimanche 9 août 2015

Bancocratie tunisienne

Tard dans la nuit de jeudi à vendredi 7 août, la loi 37/2015 relative à la recapitalisation et la restructuration de trois banques publiques, la Société tunisienne de Banque (STB), la Banque de l’Habitat (BH) et la Banque nationale agricole (BNA), a été adoptée dans son intégralité, par 109 voix pour, 10 contre, et 8 abstentions. Un vote qui creuse davantage le fossé entre l’élite politique et une société civile inquiète d’une culture de l’impunité institutionnalisée.

En fin de séance plénière, 90 députés étaient absents lors du vote de cette mesure qui pourrait coûter au contribuable tunisien la bagatelle de 950 millions de dinars au total, soit 100 dinars par citoyen. Une opération destinée à secourir des établissements phagocytés par la concurrence, la mauvaise gouvernance, mais aussi par la kleptocratie de l’ancien régime.

Une procédure complexe

L’Etat s’apprête en effet à injecter à la STB un minimum de 190,8 millions de dinars, auxquels s’ajoutent 191 millions de dinars indirectement, via l’actionnariat public. Les actionnaires privés, minoritaires, seront quant à eux appelés à verser 374 millions. Comme il est peu probable que cette somme soit ainsi obtenue, c’est l’Etat qui se chargera de combler ce qui manque à la recapitalisation, ce qui porterait la facture à 757 millions pour la seule STB…

Lirr la suite de l'article de Seif Soudani paru sur le site Nawaat sous le titre "La controversée recapitalisation des banques publiques".

vendredi 31 juillet 2015

Contre le terrorisme, les prémices du fascisme

Signe que le climat ultra répressif n’a pas attendu le législateur pour sévir : au moment même où les députés se penchaient sur la loi de manière expéditive, symbolique du 25 juillet en tête, le ministère de l’Intérieur annonçait des descentes de police dans pas moins de 99 locaux, aux quatre coins du pays, soupçonnés d’« abriter des organisations terroristes ».

Parmi eux, l’auteur d’une banale vidéo de type conspirationniste, accusant les autorités de complicité dans l’attaque du 26 juin à Sousse. Il faut dire que la vidéo en question est rapidement devenue virale, avec plus d’un demi-million de vues en quelques jours, les esprits réceptifs aidant. De là à l’accuser, le 27 juillet, de « terrorisme », il y a clairement une fuite en avant dans l’hystérie collective.

Une névrose particulièrement explicite dans les titres d’une certaine presse adepte du terrorisme intellectuel, où le bon vieux procédé toujours fascisant des « listes » est de retour : les noms des 10 élus qui se sont abstenus de voter la nouvelle loi est donné en pâture, avec l’injonction implicite d’en découdre via le « takhwin », réflexe intellectuel cousin du « takfir ». Un exercice dans lequel excelle depuis peu le journal du service public La Presse. Dans son édition du 28 juillet, le quotidien appelle carrément à poursuivre en justice les députés qui se sont abstenus de voter la nouvelle loi antiterroriste.

Pourtant, l’héroïsme des dix iconoclastes est tout relatif. Reconnaissons-leur du moins le mérite d’être venus affronter la séance du vote, et de ne pas s’être défilés comme les 23 absents, probablement soucieux de ne surtout pas être associés pour le restant de leur vie au grotesque procès d’intention d’« absolution du terrorisme ». En soi, le 0 vote contre en dit long sur l’état de santé de la démocratie tunisienne.

Lire l'article de Seif Soudani paru sur le site Nawaat.org

samedi 20 juin 2015

Retour à la violence policière

Durant les derniers jours, la violence policière est revenue en force pour réprimer les mouvements sociaux et les manifestations à Tunis et ailleurs. Les manifestations de la campagne #Winou_el_pétrole ont été réprimées, d’une façon systématique, par la police. Les arrestations aléatoires ont été multipliées et le silence du ministère de l’Intérieur se fait de plus en plus pesant.

Le samedi 6 juin, à l’Avenue Habib Bourguiba, des dizaines de manifestants ainsi que des journalistes ont été tabassés violemment par des agents de police lors d’un rassemblement populaire de la campagne #winou_el_pétrole. Les partisans de la campagne affirment que 70 personnes ont été arrêtées par la police et relâchées le même jour.

Aman Allah Mansouri, un des militants tabassés durant cette manifestation, témoigne que «l’ambiance était très tendue et les policiers étaient beaucoup plus nombreux que les manifestants! D’un coup, je me suis retrouvé entouré par sept policiers qui m’ont tabassé sauvagement. Des coups de poings et de pieds sur tout mon corps même après avoir montré ma carte de journaliste. Après, ils m’ont emmené à un fourgon pas loin et ont continué à me tabasser durant une dizaine de minutes. Je me suis évanoui entre temps … Après m’avoir relâché, j’ai essayé d’avoir un certificat médical, mais les médecins ont refusé et en sortant de l’hôpital étatique Charles Nicole, j’ai trouvé les mêmes policiers qui m’ont encore une fois agressé dans leur camion…», atteste Mansouri, qui a porté plainte contre ses agresseurs.

Dans la même manifestation, le militant d’Amnesty International, Nadim Bouamoud, a été violemment tabassé. «Les policiers qui m’ont battu voulaient confisquer ma caméra et mon ordinateur. À l’hôpital, on m’a prescrit 10 jours de repos et le médecin a constaté une commotion cérébrale. Suite au soutien de quelques organisations des droits de l’homme comme Amnesty International, l’Observatoire des Droits et des Libertés et l’Organisation Mondiale Contre la Torture, le ministre de l’Intérieur s’est engagé à suivre de près ce dossier en disant explicitement que le ministère est prêt à renvoyer les coupables comme il l’a fait dans des cas précédents», témoigne Nadim.

Lire la suite de l'article d'Henda Chennaoui paru sur le site Nawaat sous le titre "Retour à la violence policière et absence de réformes substantielles."

vendredi 12 juin 2015

Tunisie : RSF recense plus d’une quarantaine d’agressions de journalistes par les forces de l’ordre en 2015

Reporters sans frontières (RSF) est extrêmement inquiète suite aux dernières agressions commises par les forces de l’ordre contre des journalistes, lors de la manifestation « Winou El Pétrole », samedi 6 juin. L’organisation demande, dans un communiqué diffusé ce vendredi 12 juin, que des poursuites judiciaires soient engagées contre les agresseurs, car seules des sanctions exemplaires mettront fin à l’impunité de ces exactions.

Samedi 6 juin, alors que la manifestation « Où est le pétrole » était organisée sur l’avenue Habib Bourguiba à Tunis, plusieurs journalistes parmi lesquels Latifa Anouar de Radio 6, Latifa Hammami de Tunisie Numérique, Soumeya Ouled Gharbia de la Société tunisienne de production, Seif Trabelsi de Shems FM, Mohamed Mdalla de l’Agence turque Anadolu, Houssem Bouhla de Mosaïque FM, Khalil El Klai d’El Moutawasset et Wahiba Akoubi, correspondante à Tunis de Oasis FM ont été agressés physiquement et verbalement par plusieurs agents de police. Certains d’entre eux ont également vu leur matériel fortement endommagé.

Lire l'article paru sur le site webdo

mardi 2 juin 2015

Permanence de la révolution

Nulle part nous n’avons assisté à une victoire nette de la réaction et à un retournement de la situation tant à l’échelle régionale qu’à l’échelle continentale.

En Égypte, le maréchal Sissi a reculé devant les formidables mobilisations des bastions ouvriers et de certaines couches salariées de la fonction publique.

En Tunisie, nous n’avons pas vu non plus une défaite de l’ensemble de la classe travailleuse, même si les différentes augmentations de salaires obtenues grâce aux milliers de grèves qui ont éclaté durant les années 2011, 2012 voir 2013, ont été grignotées par une inflation organisée et une dévaluation de la monnaie nationale qui sont les deux armes dont dispose la bourgeoisie pour récupérer d’une main ce qu’elle cède de l’autre en période de forte mobilisation.

Nous avons assisté aussi à un phénomène de fuite de capitaux et un début de délocalisation de « patrons voyous », tunisiens et étrangers, (plus d’un milliers) visant à faire payer aux travailleurs leurs « indiscipline » et leur « entêtement ».

« Courant chaud » de la révolution *

Durant ces quatre premières années, ce que l’on peut retenir, c’est d’abord et avant tout que nous sommes toujours dans le « courant chaud » de la révolution.

La formidable mobilisation des masses populaires et de la jeunesse a fini par « dégager » le Ben Ali du Burkina Faso : Blaise Campaoré, l’assassin de Thomas Sankara, durant l’année 2014.

En Grèce, Syrisa (le « Front Populaire » grec) qui ne s’est jamais compromis dans une alliance avec un « Bajbouj » grec, vient d’emporter les élections législatives, suite à la crise institutionnelle due à l’incapacité de la droite grecque de constituer une large alliance de gouvernement.

En Espagne, Podemos vient de bousculer le train train institutionnel et bientôt au Portugal, voir en Irlande, les gauches radicales peuvent réitérer l’exploit.

Avec la chute vertigineuse du prix du baril de pétrole (moins de 60 dollars le baril), les généraux algériens qui avaient des prétentions de remettre de l’ordre chez leurs voisins tunisien et libyen en intervenant directement dans leurs affaires (soutien à Haftar en Libye et alimentation des filières « terroristes » en Tunisie dans la bonne tradition des GIA de la décade sanglante en Algérie) ; en sont à réviser leurs stratégies : la poudrière algérienne calmée à coups de distribution d’une partie de la rente pétrolière est sur le point d’exploser, à nouveau, par l’épuisement de la cagnotte exceptionnelle de devises…

Les grèves générales qui se sont déroulées en Italie, en Belgique, les grèves sectorielles importantes qui secouent l’Allemagne et l’Espagne et l’annonce que 2015/2016 va encore voir la crise systémique inaugurée en 2007/2008 s’aggraver, voilà un beau cocktail explosif Toutes les fortes mobilisations qui secouent l’Etat tunisien au moment où la Destourie revient aux commandes indiquent que celle-ci ne connaîtra point de répit.

Elle reprend les rênes du pouvoir en n’ayant aucune marge de manœuvre. Nen déplaisent à tous ceux qui s’illusionnent sur un soutien des principaux partenaires impérialistes à la « jeune démocratie tunisienne » ; en affaires, les affaires sont les affaires ! Pour ne prendre que le principal partenaire de la Tunisie, la France de Hollande; la récession qui frappe l’économie de ce pays fait que ce dernier a plus besoin de déverser sa quincaillerie en Tunisie que de voir les produits tunisiens vendus en plus grande quantité en France… L’affaire de la vente des Rafales, dont personnes ne veut, à l’Etat égyptien désargenté en est une preuve supplémentaire de la fuite en avant de dirigeants « socialistes », qui comme leurs alter-égos Umpistes, pompent dans les rétro-commissions et les dessous de table pour renflouer les caisses noires des futures élections…

2015 est l’année du renouveau des luttes après l’intermède « élections » qui a joué le rôle de temporisateur pour de larges secteurs de la population.

La dégradation du pouvoir d’achat d’une grande partie de la population, l’augmentation vertigineuse du chômage, en particulier des jeunes, due à une croissance toujours en berne pour toutes les raisons citées plus haut sont gros de perturbations sociales inévitables.

La descente en enfer qui va toucher une grande partie des fameuses « couches moyennes » qui assistent à la disparition du mirage de l’argent facile produit essentiellement par le jeu de la spéculation sur le foncier en particulier et sur toutes ces branches de l’économie informelle alimentée par les trafics en tous genre aggravera encore la situation qui nous rappellera, alors, celle de la Grèce et de l’Espagne.

Ajouté à tout cela une politique d’austérité que la Destourie met en œuvre pour contenir les dépenses qui explosent, à l’exemple de la caisse de compensation, tout cela est un mélange détonnant annonçant les soubresauts à venir.

Extrait de l'article de Hamadi Aouina paru sous le titre « Il faut prendre à César tout ce qui ne lui appartient pas » sur le site Nawaat

lundi 1 juin 2015

Du droit, ou pas, de faire grève

Personne n’aura échappé ces temps-ci aux interminables débats sous forme de polémique sur l’ensemble des mouvements sociaux qui ponctuent la vie de la nation. Des mouvements populaires sans précédent. Des révoltes qui n’ont fait que mettre en évidence, sous les grossissements d’une loupe impardonnable de vérité, les inégalités entre les diverses couches du pays et autres « richesses » inégalement dispatchées sur les différentes régions.

Lire l'article de Selima Karoui paru sur le site Nawaat

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